Carnet d'expédition

Explorations entre ville Panaméenne et îles paradisiaques

Après avoir traversé le canal du Panama, nous nous retrouvons dans une petite marina, le Balboa Yacht-Club. Jamais nous ne nous étions retrouvés dans un port aussi ridicule : il doit y avoir une trentaine de bouées, servant autant pour les navires de plaisance que pour les bateaux professionnels du canal et il n’y a pas de quai. Pour aller à terre, il faut appeler à la radio VHF ou en criant un bateau taxi qui fait office de navette personnelle.

Balboa Yacht Club — Photo : Billy Foster Photography

Avec sa toute petite taille la marina possède des équipements assez rudimentaires ; il y a une station essence pour les bateaux, une douche et deux toilettes (pas toujours dans des états d’hygiène excellents). Cela dit, le personnel est très serviable (du moins, le conducteur du bateau taxi).

Nous profitons de cette escale pour nous reposer et pour effectuer les quelques bricolages nécessaires avant de reprendre la mer. Nous remontons les panneaux solaires que nous avions démontés il y a quelques jours et nous faisons la grosse révision du moteur de l’annexe qui ne voulait plus redémarrer après ses péripéties avec Lucas. La chaleur est écrasante, bien plus qu’à Colón puisqu’il n’y a plus l’air des alizés pour nous rafraîchir.

Deux jours après notre arrivée, nous décidons d’aller faire un petit périple à Panama City pour voir à quoi ressemble la capitale. Nous commençons par le quartier français, un coin historique et touristique très bien entretenu. Nous sommes entourés de vieux bâtiments coloniaux dont l’état est irréprochable. Il y a également pas mal de gardes et de militaires dans les rues ce qui est plutôt rassurant. L’ambiance est donc très différente de Colón puisque beaucoup de touristes sont ici pour flâner et pour visiter les boutiques de souvenirs.

Après ce premier quartier pittoresque, nous décidons de visiter l’autre partie de la ville, son centre névralgique. Là, c’est deux salles deux ambiances. Alors que dans un premier temps nous étions plongés dans le quartier historique de Panama City, là nous nous retrouvons au milieu d’immenses buildings des quartiers d’affaires. Les artères sont immenses et il y a beaucoup de circulation. Nous ne retrouvons pas l’esprit panaméen rencontré précédemment et nous explorons une ville aux apparences américaines. Dans la rue, les fast-foods sont bien présents et nous visitons même un mall (sorte de centre commercial).

Il est donc là, le grand écart panaméen. En l’espace de quelques jours nous sommes passés de la ville populaire de Colón à l’hypercentre économique de Panama City. La différence de niveau de vie et d’infrastructures est extrêmement frappante et nous préférons l’authenticité de Colón à la frénésie de la capitale.

Forts de cette expérience, nous quittons Panama City pour notre première escale, l’île de Taboga. Le mouillage est plutôt bon malgré le vent et nous nous retrouvons dans une baie en face d’un petit village pittoresque.

Isla de Taboga

Au premier abord, l’île semble être une attraction touristique, un peu comme notre Collioure nationale. Il y a très peu de véhicules à terre et la plupart des habitants se déplacent en voiturettes de golf. Les maisons sont assez rudimentaires mais fortement colorées; le village est tout petit. Le calme présent sur l’île est très agréable. Puisque nous sommes arrivés en semaine, il n’y a pas de touristes et nous nous retrouvons donc entourés des quelques locaux qui y vivent à l’année.

Nous profiterons de cette escale reposante pour travailler et nous y resterons deux jours. Pendant ce temps, j’aurai l’occasion d’aller me balader en forêt et je tomberai sur une décharge à ciel ouvert. C’est la première fois que je me confrontais à une telle chose. Les habitants semblent regrouper tous leurs déchets dans un espace au cœur de la forêt, pour ensuite les brûler.

Décharge à ciel ouvert dans les hauteurs de Taboga

Lorsque j’arrive sur les lieux, il y a encore de la fumée qui sort des montagnes de détritus et beaucoup d’oiseaux grattent les décombres pour essayer de trouver de quoi manger. Le décor est désolant et nous rappelle, qu’en France, nous avons la chance d’avoir un système de traitement des déchets relativement efficace.

À la suite de cette première escale, nous reprenons la mer direction l’île aux iguanes. La navigation n’est pas longue puisque nous arrivons moins de 24 heures après le départ de la précédente île. Cette fois-ci, le mouillage n’est pas facile : nous arrivons de nuit et il y a beaucoup de vent. De plus, la carte semble mauvaise et nous mettons un petit peu de temps avant de trouver un mouillage satisfaisant. La nuit sera quelque peu agitée puisque les vagues berceront le bateau.

Le lendemain, nous partons explorer l’île et son rivage. À terre, nous nous retrouvons à marcher au milieu de trous d’obus datant de la seconde guerre mondiale. En effet, cette île appartenait aux Américains où ils y effectuaient des tests militaires. Aujourd’hui, c’est une réserve naturelle, connue pour ses nombreux iguanes. Nous rencontrons donc nos premiers reptiles et nous sommes quelque peu impressionnés. Les plus gros d’entre eux dépassent les 1m et leurs couleurs vertes et marron leur permettent de se camoufler parfaitement dans la végétation. Nous faisons bien attention où nous posons nos pieds mais Émilien réussi quand même à marcher sur un iguane. Heureusement sans conséquence.

Nous profitons aussi de cette île pour nous baigner dans son lagon et pour observer les poissons et les coraux qui le peuplent. Les couleurs sont incroyables et lorsque nous passons au-dessus d’un tombant, nous nous retrouvons au-dessus d’une myriade de poissons exotiques. Nous observons des poissons-Perroquets, des poissons-Coffres, un poisson-Lune, quelques murènes… Jamais nous n’avions vu autant de poissons de notre vie.

Vers 16h, les gardes-côtes nous demandent de quitter la terre et nous retournons donc au mouillage. Nous profitons d’avoir du temps pour pêcher et bingo ! Nous attrapons deux poissons que nous mangeons le soir. Seul petit problème, les poissons pêchés sont des poissons de roche et le goût n’est pas vraiment au rendez-vous…

Encore une fois, avec les vagues et le vent, nous passons une mauvaise nuit car le bateau bouge beaucoup. Au petit matin nous décidons de partir direction la prochaine île, mais nous aurons une très mauvaise surprise avant le départ.

Avec le courant et les vagues, la chaîne s’est coincée sous un énorme rocher à 10 mètres de fond. Émilien et moi avons beau plonger, rien n’y fait, impossible de décoincer la chaîne. Il faudra donc que l’on manœuvre à 3 pour réussir à décoincer le bateau. Émilien à la barre pour gérer le moteur afin de tendre la chaîne, Lucas à la proue pour indiquer l’angle de la chaîne par rapport au bateau et moi-même à enchaîner les apnées pour indiquer ce qu’il se passe au fond.

Pour ne rien simplifier, il y avait beaucoup de courant et la houle commençait à monter. C’est justement grâce à cette houle que la chaîne se décoincera. Lors d’une grosse vague, le bateau se soulèvera, arrachant la chaîne du rocher. Dans l’eau, j’entends alors un vacarme assourdissant suivi d’un énorme nuage de poussières. Après avoir vérifié au fond, je remonte vite au bateau pendant que Lucas remonte l’ancre à bord.

Après une telle épopée, la journée ne pouvait que mieux se passer. Et en effet, la navigation fut parfaite. Nous avons eu la chance de naviguer dans une mer plutôt calme, accompagnés par des dauphins. Vers 11h30 nous pêchons même un thazard tacheté du sud, une sorte d’hybride entre un thon et un maquereau. Le poisson est délicieux et nous permet de faire deux repas.

Thazard tacheté du sud

Après 20h de navigation, nous arrivons à l’île de Cebaco, où nous posons l’ancre. Le cadre est exceptionnel puisque nous nous retrouverons au milieu d’une immense baie, seuls au monde, entourés de nature vierge. La seule présence humaine est une petite maison se situant au bord de la plage.

Nous allons à terre, bien décidés à explorer ce petit bout d’île. Nous nous enfonçons peu à peu dans la jungle et nous remontons le lit d’une rivière asséchée. Nous sommes entourés d’immenses arbres et de lianes : la sensation ressentie est impressionnante. Au bout d’un moment nous voyons un animal bouger au fond d’une petite mare. Nous nous rapprochons tout doucement croyant voir un bébé crocodile mais c’était en fait un iguane qui se prélassait dans l’eau.

Nous continuons donc prudemment la randonnée jusqu’à arriver à une cascade formant une piscine naturelle. Le cadre est idyllique et nous y faisons halte pour pique-niquer. Le petit ruisseau nous surplombant forme une cascade coulant le long des parois rocheuses. Nous profitons de la piscine naturelle pour nous baigner dans une eau limpide.

Après manger, nous retournons sur la plage et nous croisons un serpent en chemin. Le reptile nous passe devant et disparaît très vite dans la forêt dense. Nous restons donc bien vigilants et rentrons à la plage. Là-bas, nous trouvons des noix de coco et un régime de bananes. Nous décidons de garder le régime pour le bateau et, à l’aide de nos machettes, nous ouvrons des noix dont nous buvons l’eau et mangeons la pulpe. À cet instant nous nous sentons vraiment comme des Robinson Crusoé et le rêve d’exploration devient réalité. Nous observons la baie et les pêcheurs rentrant dans la petite maison de plage.

Le lendemain, nous décidons de reprendre la mer pour atteindre dans l’après-midi l’Isla Cavada. Encore une fois le mouillage est incroyable : l’eau est aussi transparente que du cristal et nous ne mettrons pas longtemps à aller nous baigner. En dessous de nous, la vie est extrêmement présente. De grosses têtes de corail regroupent les animaux autour d’elles et nous retrouvons les espèces de poissons que nous avions rencontrées à l’île des iguanes.

Mouillage exceptionnel

Beaucoup de poissons-Perroquets mais aussi des poissons Chirurgiens et plein de murènes. Nous avons même la chance de voir une raie bleue à points blancs. Nous pêchons, ce qui nous permet de manger un délicieux poisson-Perroquet le soir même. Le lendemain nous allons à terre pour explorer l’île.

Celle-ci est habitée et un énorme complexe très luxueux d’éco-lodge y tient place. L’île est paradisiaque et les installations sont exceptionnelles. Rien d’ostentatoire, tout est fait pour être camouflé dans la nature. Le lieu est incroyable mais visiblement les prix aussi puisque les clients viennent directement en avion sur l’île (on apprendra par la suite que la nuit coûte 3 000 dollars).

Le soir, comme la veille, nous profitons des eaux transparentes pour observer les poissons et nous pêchons de nouveau un poisson-Perroquet que nous mangeons le soir.

Le lendemain, nous reprenons la mer et encore une fois les conditions de navigation sont parfaites. Entre ces îles, la vie est extrêmement présente et les eaux sont très poissonneuses. Si bien que nous croisons plusieurs fois dans la journée des dauphins, des bancs de thon (nous en pêcherons un d’ailleurs) et des serpents de haute mer. Ces serpents nous surprennent car ils sont orange en dessous, noir sur le dos et la queue est blanche tachetée de noir. En faisant des recherches, nous apprenons que ce sont des pélamides et que ces serpents ne vivent qu’en mer, se servant d’algues et de bouts de bois flottés pour se reproduire et chasser. Ils ne sont pas vraiment dangereux pour l’homme bien que leur venin soit potentiellement mortel.

Dans la nuit, nous passons la frontière virtuelle entre le Panama et le Costa Rica et sur les coups de 4h du matin, nous arrivons enfin à notre destination finale : Golfito. Cette petite ville au sud du Costa Rica sera donc le point de base de notre expédition dans ce pays.


7 Commentaires d’article de blog
  • Christian et Monique
    février 28, 2022Répondre

    C’est pas du jeu, Danièle a tout dit! C’est exactement ce que nous pensons! Merci de nous faire partager votre aventure avec tellement de réalisme et de spontanéité que nous naviguons avec vous, nous plongeons avec vous, nous explorons avec vous. Nous pouvons même remonter l’ancre avec vous pour repartir à nouveau à l’aventure avec vous…

  • Nicolas
    février 28, 2022Répondre

    Magnifique profitez un Max , c est pas tous le monde qui vie une expérience pareille 👍

  • Nicolas
    février 28, 2022Répondre

    Magnifique, c est un plaisir de lire vos aventures, on essaye d imaginer ce que vous pouvez ressentir
    Ça doit être fort et génial à la fois . Bravo continuez à nous faire rêvez , profitez un maximum c est pas grand monde qui vie une expérience pareille 😉👍👏

  • Poser
    février 27, 2022Répondre

    Profitez bien les gars, ça à l’air d’être une putain d’expérience !

  • Danièle Ruibet
    février 27, 2022Répondre

    Passionnant ce voyage et si bien raconté ! On partage votre avanture comme si on y était . Je pense que c’est tellement fantastique et incroyable qu’elle vous marquera toute votre vie et que même vous petits enfants vous diront ”dis moi papy, raconte nous ton tour du monde en bateau!” et ils ne s’en lasseront pas! Quelle superbe expérience humaine!

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